Résumé Bref
Cette vidéo est une introduction à un cours sur la croissance économique et la démographie, en particulier avant et pendant la révolution industrielle. L'orateur, fraîchement honoré d'un prix Nobel, exprime sa gratitude et son humilité. Le cours aborde la trappe malthusienne, les liens entre croissance et démographie, et les explications technologiques et institutionnelles du décollage économique.
- L'orateur a reçu le prix Nobel.
- Le cours porte sur la trappe malthusienne et le décollage économique.
- Les explications technologiques, démographiques et institutionnelles sont explorées.
Réaction à l'annonce du prix Nobel
L'orateur exprime sa surprise et sa gratitude pour l'attribution du prix Nobel, soulignant qu'il ne s'y attendait pas, car d'autres personnes excellentes ne l'ont pas reçu. Il mentionne qu'un prix similaire avait été décerné l'année précédente à des travaux proches de leur domaine. L'annonce a été faite par téléphone depuis la Suède, et il a été submergé de messages et de félicitations. Il a reçu des conseils pour gérer l'euphorie et éviter une potentielle dépression.
Présentation des colauréats et du plan du cours
L'orateur présente ses colauréats, Peter Howitt et Joel Mokyr, soulignant leur expertise et leur contribution au modèle schumpétérien. Il annonce que Joel Mokyr donnera trois conférences au Collège de France en mai. Le plan du cours consiste à explorer la trappe malthusienne, les explications technologico-démographiques du décollage, et l'approche institutionnelle de Mokyr.
Croissance et démographie : le modèle néoclassique
L'orateur aborde le lien entre croissance et démographie, en commençant par le modèle néoclassique où la population est un facteur de production. Une population plus nombreuse peut stimuler la croissance du PIB, mais la question est de savoir si la croissance démographique est elle-même influencée par la croissance économique. L'objectif est de développer une théorie qui explique à la fois l'évolution du PIB et de la population.
Quantifier la production de richesse : histoire des indicateurs
Pour étudier les liens entre développement économique et démographie, il faut des données sur la production de richesse et la population. Les premières tentatives de quantifier la population remontent à l'Antiquité, avec des listes de guerriers et d'ouvriers. La Chine sous la dynastie Ming a développé des techniques de recensement sophistiquées. L'Antiquité marque aussi l'apparition des premières mesures de production de richesse, comme en Mésopotamie et en Égypte antique.
Les pionniers de la statistique moderne : Petty et Graunt
Au 17e siècle, William Petty et John Graunt ont posé les bases de la statistique moderne en Angleterre. Graunt a publié des observations sur les tables de mortalité et a estimé la population de Londres. Petty a reproduit les méthodes de Graunt et a milité pour un recensement national. Petty a également tenté d'estimer l'activité économique de l'Angleterre et a plaidé pour une répartition plus équitable de l'impôt.
Reconstitution des séries longues : l'œuvre de Maddison
Angus Maddison a reconstitué des séries longues de données démographiques et économiques depuis l'an zéro. Il s'est appuyé sur différentes sources, des données standardisées aux registres administratifs, en passant par des estimations indirectes basées sur les taux d'urbanisation et les salaires réels. Après sa mort, ses travaux ont été poursuivis par l'université de Groningue, et la base de données est régulièrement mise à jour.
Analyse de la croissance à long terme : stagnation et décollage
L'analyse des données de Maddison révèle une stagnation relative du PIB et de la population avant le décollage économique. La croissance telle que nous la connaissons est un phénomène très récent, vieux d'à peine deux siècles. La faible croissance à long terme s'accompagnait de variations fortes à court terme. Venise est un exemple intéressant d'expansion suivie d'un arrêt dû à la fermeture des vannes aux nouveaux entrants.
Le décollage économique et démographique : définitions et observations
Le terme de "décollage" a été introduit par Walt Rostow pour désigner une accélération sans précédent de la croissance. Cette étape coïncide avec la révolution industrielle et une transition vers une économie centrée sur l'industrie. Le décollage économique s'est accompagné d'une explosion démographique, avec une augmentation très forte de la population.
Le paradigme malthusien : stagnation et population
L'objectif est de comprendre pourquoi, pendant si longtemps, il y a eu une quasi-stagnation du PIB et de la population. Le modèle malthusien propose une explication à cette longue stagnation. Les exemples des Hutterites et des colons français au Canada illustrent la capacité d'une population à se multiplier rapidement dans des conditions favorables.
Le modèle de Malthus : production agricole et croissance démographique
Malthus propose une explication à la longue stagnation du PIB et de la population. La production agricole résulte de la combinaison du travail et de la terre, et il y a une relation décroissante entre la taille de la population et le produit par tête en raison de la congestion. La croissance de la population dépend du niveau de vie : dans un pays riche, on fait plus d'enfants, et dans un pays pauvre, on en fait moins.
L'équilibre malthusien : stagnation et stabilité
L'équilibre stationnaire dans le modèle de Malthus est atteint lorsque la croissance de la population est nulle, ce qui détermine un niveau de PIB par tête constant et une population constante. Si la population augmente, le PIB par tête diminue, ce qui entraîne une croissance démographique négative jusqu'à ce que l'équilibre initial soit rétabli.
Le progrès technique dans le modèle malthusien : un piège diabolique
Dans le modèle malthusien, une augmentation de la productivité grâce au progrès technique entraîne une hausse temporaire du PIB par tête, mais à long terme, cette hausse est absorbée par une augmentation de la population. Le niveau de vie revient au niveau de subsistance, et la croissance économique durable est impossible.
Sortir de la trappe malthusienne : la restriction de la fertilité
Malthus préconise la restriction de la fertilité comme moyen d'augmenter le niveau de vie à long terme. En limitant la population, il est possible de déplacer la courbe de croissance démographique et d'atteindre un niveau de PIB par tête plus élevé. Des études empiriques valident la théorie malthusienne, montrant que les hausses de PIB sont temporaires avant le décollage.
Le décollage et les limites du modèle malthusien
Le modèle de Malthus commence à être mis à mal par le décollage économique, où le revenu par tête augmente en même temps que la population. De nouvelles théories sont élaborées pour expliquer ce phénomène, notamment une approche technologique et une approche démographique.
L'approche technologique : échapper à la contrainte de la terre
L'explication technologique du décollage repose sur la transition d'une économie agricole à une économie industrielle. Au lieu de produire avec du travail et de la terre, on produit avec du travail et du capital, ce qui permet d'échapper à la contrainte de la terre. L'exode rural alimente le secteur industriel, et la relation négative entre croissance démographique et PIB par tête disparaît.
L'approche démographique : Galor et Weil et la transition démographique
Galor et Weil expliquent le décollage par deux facteurs : un effet de taille de marché qui accélère l'innovation, et une transition démographique où les familles choisissent la qualité plutôt que la quantité d'enfants. L'accélération du progrès technique et la nécessité d'une éducation plus poussée conduisent à une baisse de la fertilité.
La transition démographique : mortalité, fertilité et facteurs culturels
La transition démographique se caractérise par une baisse de la mortalité suivie d'une baisse de la fertilité. La baisse de la mortalité infantile et la hausse du revenu par tête influencent la fertilité désirée. Des facteurs culturels, comme la sécularisation, peuvent également jouer un rôle important. La France est un cas particulier où la fertilité a commencé à décroître avant le décollage économique.
L'approche institutionnelle : introduction et concepts clés
L'approche institutionnelle, défendue par Douglass North, Joel Mokyr et Daron Acemoglu, met l'accent sur le rôle des institutions dans le développement économique. Les institutions sont définies comme des règles du jeu qui réduisent l'incertitude et déterminent les incitations. Mokyr reprend les trois éléments du paradigme schumpétérien : l'innovation cumulative, les droits de propriété et la destruction créatrice.
Institutions inclusives vs. extractives : le rôle de la destruction créatrice
Acemoglu et Robinson distinguent les institutions inclusives, qui favorisent la répartition du pouvoir, la protection de la propriété privée et la concurrence, des institutions extractives, qui concentrent le pouvoir et entravent la destruction créatrice. Les économies inclusives réussissent, tandis que les économies extractives échouent. Des mesures de la Banque mondiale confirment la corrélation entre institutions inclusives et développement économique.

